Un jour d’été, en remontant d’une exploration de plongée en apnée pour observer les poissons de notre belle mer Méditerranée, des sifflements et des bourdonnements sont apparus soudainement.
Bon, rien de grave en apparence, la vie continue et j’oublie cet épisode anecdotique.
Puis, au fil des jours, je découvre que j’entends des bruits dans ma tête, en particulier le soir au coucher avant de m’endormir.
Plus les soirs passent, plus ces sifflements ressemblent certaines nuits à un bruit de cocotte-minute en plein mijotage… Au bout de quelques mois, cela devient insupportable. Cela commence même à m’obséder… Je sais qu’à l’heure du coucher je vais retrouver la cascade dans ma tête.
Je décide de consulter mon médecin et le verdict tombe : je suis atteinte d’acouphènes. C’est la première fois que j’entends parler de ce phénomène pour lequel la médecine n’a pas grand-chose à me proposer.
On me demande de passer une IRM pour voir si je n’ai rien au cerveau, je consulte ensuite l’angiologue et m’applique à prendre un traitement.
Je finis enfin chez l’ORL pour m’entendre dire qu’il n’y a rien à signaler ; il n’y a pas de solutions, je dois apprendre à vivre avec un essaim de bourdons dans ma tête le restant de mes jours…
Passer toute ma vie avec cette compagnie intrusive et hurlante, c’est l’horreur… Je suis dans un tel désespoir, qu’un soir je fracasse ma tête contre le mur.
A la minute même, je suis choquée par cet excès de violence et je réalise profondément que je ne vais pas pouvoir continuer à lutter ainsi…
Heureusement, depuis plusieurs mois, je découvrais la méditation et me passionnais pour les enseignements bouddhistes emplis de sagesse, invitant au lâcher prise, à la rencontre de l’esprit et de ses phénomènes mentaux : les pensées.
La traversée en pleine conscience des acouphènes et son lot d’émotions allait commencer.
Voilà un beau sujet de méditation que la vie me portait gentiment avec toute la grâce d’un ange jouant de la trompette dans mes oreilles.
Ce fut un chemin d’acceptation et d’abandon. Petit à petit, je me familiarisais grâce à la méditation avec ma colère d’entendre les acouphènes et de les voir revenir chaque soir, mon obsession d’être à l’affut du bruit intérieur, mes pensées qui commentaient la scène nocturne…
Puis, un jour, je réalisai que tout avait disparu. Ils étaient là en arrière fond continuant de jouer leur petite musique lancinante, surtout les soirs de concert, mais si faiblement que je finis par les oublier et m’endormir sans ne plus « penser » à eux.
J’avais apprivoisé les émotions et les pensées liées à leur présence, jusqu’à en découvrir leur absence. Je ne parlais plus de « mes » acouphènes mais d’un phénomène extérieur à moi, auquel je n’étais plus identifiée. Enfin, libre d’obsession, je contemplais parfois leur visite nocturne et aussitôt leur dissolution dans le silence des bras de Morphée enfin retrouvé.
La méditation en pleine conscience ne guérit pas toujours les maux, mais elle permet souvent de traiter la souffrance morale qui se rajoute à la douleur physique.
Elle nous aide à faire face plutôt que de s’épuiser dans un combat, à accueillir plutôt que de lutter férocement.
Et parfois, en apprenant ainsi à s’aimer tel que l’on est, la délivrance survient sans prévenir, sans bruit, dans la plus grande humilité.